2018.03.08 – 2018.04.17
Affinités électives
Galerie Division, Montréal
www.galeriedivision.com
Regroupe les œuvres de Jean-Pierre Gauthier, Michel de Broin, Dominique Sirois, Louis Bouvier, Grégory Chatonsky et Mathieu Latulippe. Sous le commissariat de Aseman Sabet.
Les forces d’attraction inhérentes aux réactions chimiques trouvent-elles écho dans la sphère des relations humaines ? Cette question dessine les contours du roman que Goethe publie en 1809 et dont cette exposition emprunte le titre. D’entrée de jeu, “Les affinités électives” relève d’un libre dialogue entre la science et la sensibilité. L’auteur aborde les rapprochements naturels, suppose l’idée d’un déterminisme affectif et interroge au détour la part qui revient à la décision dans les élans passionnels. Partant de ces considérations, il s’agit ici d’offrir un espace de réflexions sur les liens entre les registres scientifiques et affectifs, en recoupant les notions d’utopie, de technologie, d’identité, de nomenclature et d’histoire. À travers cette diversité de points de vue, les oeuvres déploient une charge sensorielle. Les évocations de la chair et des textures telluriques côtoient les références olfactives et haptiques, projetant la corporalité dans des fictions anthropomorphiques et anachroniques. Les principes d’associations et d’interrelations sont fondamentaux : ils s’articulent de manière autonome dans chacune des propositions, en écho aux mécanismes sélectifs, émotifs et combinatoires qui orientent la mémoire autant que nos anticipations du futur. La réunion de ces six artistes aux parcours distincts découle également d’une volonté d’observer les multiples points de rencontre entre leurs pratiques respectives. En ce sens, le concept d’affinité élective rappelle les procédés d’agencement et de composition dont relève à la fois le travail de l’artiste et celui du commissaire. Par extension, il permet de penser à la fonction structurante du tissu relationnel dans le monde de l’art.
Tube, 2016, 22 x 72 x 32 in
Un grand tube de plâtre repose sur une civière à la manière d’un corps anonyme dont la solitude et l’état de vulnérabilité appellent une certaine empathie. Ce boyau dénudé peut aussi évoquer un élément de plomberie, un segment circulatoire découpé et isolé de son réseau. Bien que l’ouverture béante traversant la forme d’un bout à l’autre brouille la distinction entre l’intérieur et l’extérieur, l’objet impose une masse sculpturale, un poids matériel dont la singularité met à distance le contexte référentiel médical. Le caractère intrigant de la forme tubulaire est renforcé par le vide incertain que ses deux orifices donnent à voir. L’œuvre met en relief l’attention de l’artiste pour les assemblages imprévisibles et la recherche de nouvelles configurations du sensible.
Crépuscule # 256, 2017, 120 x 120 x 13 cm
256 ampoules éclatées sont alignées sur une grille de seize rangées, à égale distance les unes des autres. Des fragments de bulbes brisés tiennent encore aux culots, alors que d’autres ont complètement disparu, ne laissant voir que la tige et les fils conducteurs. Sous un boîtier transparent qui les protège dorénavant des forces extérieures, elles apparaissent comme les décombres d’une architecture qui aurait subi une commotion extrême, soufflée par une déflagration. Si la portée symbolique de l’ampoule allumée renvoie aux idées innovatrices et à la figure du génie, l’éclatement de l’objet peut signaler l’obscurantisme ou les dérives de la pensée. Ce cimetière d’ampoules éclatées s’ouvre ainsi à des lectures plurielles, allant de l’obsolescence à la faillite de la raison. Les innovations techniques promettent un monde délivré de la misère, mais elles peuvent aussi mettre en œuvre de nouvelles formes de domination et de violence.